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Florent Ciccoli, cofondateur des Bars populaires : « L’idée était de faire un bar comme on les aime quand on a 25 ans et qu’on est fauché : sympa et pas cher »

Cela peut sembler étrange, mais, quelque part, j’ai toujours voulu être patron de bar. C’est ce que j’indiquais sur les fiches d’orientation au collège. J’aimais bien écrire ça, patron de bar. C’était sans doute plus de la provocation qu’autre chose, car j’ai grandi dans l’environnement bourgeois du 6e arrondissement de Lyon et je n’avais pas vraiment d’exemples de bars alentour. Mais j’ai toujours aimé les endroits festifs où l’on reçoit les gens, où l’on accueille, on nourrit, on fait plaisir.
J’ai déménagé à Paris à 21 ans, après le décès de ma mère. J’avais besoin de changer d’air. J’ai continué mes études de psychologie à l’université de Paris-VIII, à Saint-Denis. Pour payer mon loyer, je travaillais dans un bar à Montmartre, Le Rendez-vous des amis, qui avait été monté par des étudiants de Sciences Po comme projet d’étude collectif. C’est là que tout a commencé.
Avec d’autres serveurs et un habitué, on s’est rendu compte qu’on adorait cet univers et qu’on avait envie d’ouvrir un lieu à nous. Il y avait Greg, Lô, Jean, Raman, Joseph… On en a parlé à nos patrons et, au lieu de s’énerver parce que quatre employés les lâchaient, ils nous ont soutenus et se sont portés caution auprès de la banque. Ce sont eux qui, les premiers, m’ont aidé à me décomplexer à l’égard de l’entrepreneuriat.
Six mois plus tard, nous ouvrions notre première adresse, Les Caves populaires, un petit bistrot d’angle rue des Dames (17e). L’idée était de faire un bar comme on les aime quand on a 25 ans et qu’on est fauché : sympa et pas cher. Un an plus tard, on ouvrait Les Pères populaires, dans le 20e arrondissement, un grand espace dans son jus (il l’est toujours), où nous avons commencé à faire à manger. Thomas Chevrier, un ami cuisinier, s’est mis aux commandes, fourmillant d’idées, et il a lancé une formule entrée-plat-dessert à 14 €. Cela a rendu le lieu vivant et plein du matin au soir.
Tout est allé très vite ensuite, on a ouvert une douzaine de lieux entre 2006 et 2016. On a construit un petit empire, notre bande a compté jusqu’à trente-quatre associés – c’était un joyeux bordel. Et puis, on a eu des envies différentes, et on a décidé de se séparer et de se répartir les affaires.
Certains sont partis, d’autres, comme Greg ou moi, ont repris chacun une enseigne. Je me suis mis aux fourneaux chez Jones, tant par nécessité que parce que ça me titillait. L’une des premières recettes que j’ai faites, ce sont les truites à la cortenaise de mon père. Il en préparait une fois par semaine, ça le mettait en joie. C’est une recette corse, d’où il est originaire. Je me souviens de cette odeur d’ail et de vinaigre qui embaumait dans la maison. Et parfois nous allions pêcher la truite ensemble, dans un étang de pisciculture.
J’étais tellement fier de mes prises que je ne me rendais pas compte qu’il passait à la caisse derrière. On se régalait des truites, juste avec la sauce. Je n’ai jamais trouvé cette recette ailleurs. Mon fils est allergique au poisson, alors je n’en prépare plus beaucoup. Mais c’est un souvenir qui est lié autant à ma famille qu’à mes débuts au restaurant.
Jones, 43, rue Godefroy-Cavaignac, Paris 11e.Café du coin, 9, rue Camille-Desmoulins, Paris 11e.Recoin, 60, rue Saint-Sabin, Paris 11e.L’Orillon, 35, rue de l’Orillon, Paris 11e.
Camille Labro
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